Lapinou est là...

Enhydris tournait en rond dans sa cage : on lui avait servi du foin. Du foin ?! comme à un vulgaire lapin, lui qui était le fruit d'un génie, certes un peu dérangé, mais bon... A force de faire des cercles, il finissait par s'épuiser. Il s'assit donc sur sa petite queue en pompon et frotta son oreille coupée qui l'élançait parfois.

"Je dois me sortir d'ici !" hurlait-il souvent. Mais personne ne paraissait faire attention à lui. Il tenta plusieurs méthode : le gentil lapin, la démonstration de karaté ou de taikwondo,... Malgré l'espace réduit il se donnait du mal pour qu'on le regarde...

Bien entendu, Shizoue n' ignorait rien de ces expériences vendues en un lieu donné, et dans sa solitude d' étudiante, elle avait, à l' heure actuelle, suffisamment économisé pour s' en offrir un.
Oui, pas de sortie pendant quelques temps, des recherches pour des entreprises diverses, elle avait suffisamment et son regard émeraude se posait désormais sur les cages...
Des cages, c' était inhumain de réagir de la sorte, puisqu' après tout, c' était bien des humains non? Méritaient-ils un traitement comme celui-ci?

Tant son coeur que son âme lui soufflaient que son acte actuel n' était certainement pas une bonne réaction, pas une bonne solution du tout, qu' elle allait exploiter un humain, c' était un peu de l' esclavage.
Mais elle tentait de se convaincre qu' elle allait lui offrir un foyer, et c' était le sortir de cette horrible cage.
Son regard se posait tour à tour sur chaque cage, ils étaient tous étranges, adorables, certes mais non...
Jusqu' à ce qu' elle parvienne à voir celui-là, sa petite oreille blessée, ce besoin de se faire remarquer par tous les moyens, était-ce donc lui qu' elle avait entendu crier bien avant?

Elle posa donc son regard de facon prolongée et le fixait alors, sans dire un mot, elle observait chaque partie de son être, tentait de le cerner un peu, de comprendre ce qu' il pouvait cacher, ce qu' il était.

Enhydris s'arrêta un instant et regarda autour de lui. Il sentait un regard qui le fixait abondamment. Quelques bonds à guache, quelques uns à droite... Un peu remuer son nez... Il savait parfaitement jouer le rôle. Elle le regardait, d'un étrange oeil vert. L'autre se cachait souvent derrière une ample mèche.

° Que peut-elle bien penser de moi. Ne suis-je qu'un spectacle dans une cage ? Dois-je l'attendrir ou la faire frissoner ?°

"Bonjour ! Qui êtes-vous ?"

Ca y est, il n'avait pas pu se taire, il avait encore du prendre les devants... Il ne restait plus qu'à voir comment elle allait réagir...

-Oh je...

Elle venait de se mettre à rougir, surprise dans son étude de ce pauvre bougre, elle était alors un peu perdue et prit le temps d' étouffer un soupir et de perdre ses rougeurs avant de se présenter.
En s' inclinant légérement, elle lui offrit alors un sourire et prit le temps d' articuler son nom.

-Shizoue Chikusa, et quel est ton nom?

Comme il devait la prendre pour une idiote avec cette facon de le regarder dans sa pauvre cage, comme une chose frêle, comme une bête sans interet, elle se sentait plus que mal à l' aise face à lui.
Oui il n' était pas complétement humain mais il l' était tout de même après tout, et il méritait autant de respect que les autres, qu' elle.

-Tu es blessé non? Et on ne t' offre aucun soin? Je suis vraiment navrée de t' avoir observé ainsi...

Oh oui, pour être désolée, elle l' était vraiment, et elle espérait qu' il n' allait pas trop lui en tenir rigueur.

Le ton est l'attitude de la visiteuse surprit Enhydris qui s'attendait à plus de rigueur. Ces dernières années, il avait dû s'habituer à la dureté des humains et avait quelque peu oublié qu'il en existait de plus aimable que d'autres...

"Personne ne me soigne, mais, je n'ai presque plus mal. C'est une vieille blessure."

Inconsciemment, il passa une patte sur son oreille avant de se ressaisir :

'Excusez-moi, je suis très impoli. Je m'appelle Enhydris. J'esoère ne pas vous avoir fait trop mauvaise impression tout-à-l'heure quand vous m'observiez. J'ai vécu tant de choses et..."

Il s'arrêta net : il recommençait à parler trop (surtout de lui)...

"Pourquoi vous excusez-vous ? Vous êtes l'humaine et je suis l'expérience. Vous avez tous les droits..."

Enhydris tenait à faire bonne impression...

Oh ca non, il ne devait pas être habitué en effet à ce qu' on le considère différemment et elle en esquissa un léger sourire avant de le regarder avec un peu plus de tendresse.
Accroupie désormais, elle semblait plus proche de la cage, comme désireuse de le laisser s' échapper de cette horreur que doit être la vie ici.

-Ce n' est pas une raison de ne pas la soigner tout de même!

Faire de la recherche génétique, ca ammenait tout de même quelques connaissances sur les blessures plus ou moins légères, sur les risques divers, et comme à son habitude, elle s' inquiétait, tout en remettant sa mèche en arrière, révélant ses yeux verts émeraudes et l' intensité complète de son regard :

-Enchantée Enhydris!

Bien sur, elle gardait son sourire délicat aux lèvres et elle commencait déjà à l' apprécier, même si les habitudes cruelles qu' on avait dut lui enseigner allait devoir bien vite se perdre avec elle, elle ne le considérait après tout que comme un humain un peu modifié.

-Tu as autant de droit que moi, du moins, à mon avis, crois moi!

Enhydris sentit une vague de chaleur envelopper son coeur. Il existait encore sur terre des êtres capables d'un peu de compassion. Il se retourna dans sa cage et tenta de camoufler du meiux qu'il pouvait toutes les blessures qu'il portait. Ce n'était pas un grand combattant, mais pas une chochotte non plus. Quelques bobos ne devaient pas attendrir la visiteuse. Il fallait montrer sa force et sa bravoure.

Il se retourna pour répondre à sa dernière remarque et se retrouva face à un regard et un sourire éblouissants. Il ne put même pas articuler un mot. C'était comme si elle l'avait hypnotisé d'un claquement de doigt. Il sut aussitôt qu'il ferait tout pour pouvoir suivre ces yeux hors de l'enfer dans lequel il était enfermé. Toute sa bravoure et son courage se dégonflèrent, et il se retrouva dans sa peau de lapin banale. Il se mit une petite claque et se redressa. Mais il avait bien des difficultés à ne pas chercher le contact à nouveau avec ce si fascinant regard émeraude.

Enfin, il retrouva l'usage de la parole :

"Je dois sortir d'ici. S'il-vous-plaît, aidez-moi. Je saurai vous prouver ma reconnaissance."